Articles principaux – La revue Légion https://legionmagazine.com/fr Tue, 23 Apr 2024 13:27:37 +0000 en-US hourly 1 https://wordpress.org/?v=6.4.3 Un héros du front intérieur https://legionmagazine.com/fr/2024/04/un-heros-du-front-interieur/ Tue, 23 Apr 2024 13:26:31 +0000 https://legionmagazine.com/fr/?p=6541
L’association du Génie militaire canadien

Le rôle de Walter Leja au début de la lutte contre le terrorisme urbain à Montréal lui valut la plus haute distinction, mais au prix fort.

Entre 1963 et 1970, le Front de libération du Québec (FLQ), un mouvement marxiste indépendantiste, tenta de renverser l’ordre politique du Québec par la force. Ses membres commirent notamment une soixantaine d’attentats à la bombe dans la région de Montréal, principalement contre des symboles de l’élite anglophone de la ville et des cibles du gouvernement fédéral comme les manèges, le quartier général de la Gendarmerie royale du Canada et des édifices de bureaux. La ville était constamment sur ses gardes.

André Sima/Bettmann Archive/Getty

En mai 1963, les terroristes du FLQ placèrent au moins 10 bombes, chacune armée de quatre bâtons de dynamite dans des boîtes postales à Westmount, une enclave aisée principalement anglophone de Montréal. Cinq des bombes explosèrent le 17 mai à 3 h. Il fallait vite trouver les autres et les désamorcer. C’est là que le sergent-major Leja entra en scène.

Leja était né en Pologne en 1921 et avait immigré au Canada en 1935. Pendant la Seconde Guerre mondiale, il avait servi outre-mer dans le Corps du génie royal du Canada (CGRC) en tant que démineur. En 1951, il reprit du service dans le 3e Régiment du génie du CGRC, une unité de milice basée à Westmount. Comme l’expertise de l’unité était le désamorçage de bombes, ses membres étaient en alerte au printemps 1963 pour épauler les policiers de Montréal.

Lorsque les bombes explosèrent à Westmount, il fallut examiner les autres boites postales, à la recherche de colis suspects. Leja et un autre soldat du CGRC furent dépêchés sur place. Mains nues et sans protection corporelle, Leja découvrit deux bombes qu’il désa-morça sans problème. Dans un cas, il risqua sa vie en transportant une bombe jusqu’à un champ en plein air pour minimiser les effets d’une éventuelle explosion.

« Mains nues et sans protection corporelle, Leja découvrit deux bombes qu’il désamorça sans problème. »

Le sergent-major Walter Leja fut blessé gravement lorsqu’une bombe qu’il tentait de désamorcer explosa. Le gouverneur-général Georges Vanier lui remit la Médaille de George en 1964.
BAC/4063162; spink.com

Leja désamorçait une autre bombe, au croisement des avenues Lansdowne et Westmount, lorsqu’elle explosa. La déflagration lui arracha l’avant-bras gauche et le défigura sévèrement. Sa poitrine et son torse subirent le souffle de l’explosion. Il survécut avec des dommages irréparables au cerveau et paralysé au côté droit. Il ne reparla plus jamais. 

« Il y a eu une grosse détonation et des morceaux de la boite aux lettres ont volé au-dessus de nos têtes, se souvient le photographe Garth Pritchard de la Gazette de Montréal. On l’a vu étendu par terre quand la fumée s’est dissipée. »

Leja survécut et « d’un stoïcisme difficile à appréhender, [il] passa les vingt-neuf années suivantes à l’hôpital où il finit ses jours », comme le souligne L’association du Génie militaire canadien sur son site web. Westmount institua un fonds de fiducie de 30 000 $ pour sa famille, et des membres de son unité continuèrent à lui rendre visite, surtout à l’occasion du jour du Souvenir.

Le gouverneur général Georges Vanier décerna la Médaille de George à Leja en mars 1964, décoration remise aux civils en reconnaissance d’« actes de grande bravoure » ou aux militaires pour la présence d’un courage exemplaire ailleurs qu’en présence de l’ennemi. La citation officielle note qu’il « a fait preuve d’un grand courage et d’un dévouement exceptionnels. Son geste, en plus d’inspirer et de rassurer les gens qui étaient obligés de rester près de lui, a clairement montré qu’il se souciait bien plus de la sécurité des autres que de la sienne. »

En 2013, l’Assemblée nationale du Québec a rendu hommage à Leja pour son geste et son sacrifice. Un arbre et une plaque commémoratifs situés sur les lieux de l’explosion rappellent dorénavant les hauts faits de Leja aux passants. Leja quitta ce monde à l’hôpital pour anciens combattants de Sainte-Anne en 1992.

]]>
Un système de sécurité https://legionmagazine.com/fr/2024/04/un-systeme-de-securite/ Mon, 22 Apr 2024 19:35:16 +0000 https://legionmagazine.com/fr/?p=6535

AU lendemain de la Seconde Guerre mondiale, une grande partie de l’Europe était en ruines. Ce n’était pas le continent dynamique d’aujourd’hui, nombre de villes et villages n’étaient plus que l’ombre d’eux-mêmes. Le conflit avait fait un nombre de morts ahurissant : environ 19 millions de civils et 17,5 millions de militaires.

Le rationnement, les camps de réfugiés et la malnutrition faisaient partie de la vie quotidienne. Le simple fait de survivre était une épreuve.

À l’été 1940, l’Union des républi-ques socialistes soviétiques, l’URSS, avait absorbé trois anciens États baltes indépendants : l’Estonie, la Lettonie et la Lituanie. Elle s’était également approprié une partie de la Roumanie et pour en faire la République socialiste soviétique de Moldavie. À la fin de la guerre, les troupes soviétiques occupaient plusieurs pays d’Europe centrale et de l’est, notamment l’est de l’Allemagne. 

Que faire de l’Allemagne vaincue? La question figurait alors en bonne place à l’ordre du jour des Alliés. Le pays avait été divisé en quatre zones d’occupation. Les secteurs britannique, français et américain couvraient les deux tiers du pays à l’ouest et le secteur soviétique couvrait l’autre tiers à l’est. L’ancienne capitale de Berlin, bien que nichée au fin fond de la zone contrôlée par les Soviétiques, était aussi divisée en quatre parties.

Bien entendu, les Alliés divergeaient idéologiquement, notamment sur les indemnités de guerre. Ils s’étaient initialement mis d’accord sur des sanctions, mais les Soviétiques les poussaient à l’extrême. Ils avaient complètement démantelé quelques usines allemandes pour les transporter en URSS, et ils confisquaient la production de celles qu’il restait.

Les Soviétiques devaient utiliser leur zone à l’est, très agricole, pour alimenter le reste de l’Allemagne, en échange d’une partie des indemnités des zones occidentales. Cela ne se fit jamais. Contraints de nourrir les Allemands dans leurs secteurs en puisant dans leurs propres économies, les Alliés occidentaux changèrent d’avis et appuyèrent alors le rétablissement de l’industrie allemande pour permettre aux Allemands de subvenir à leurs propres besoins. Les Soviétiques s’y opposèrent.   

Lorsque les puissances occidentales refusèrent à l’URSS ses demandes d’indemnités plus élevées, les efforts de coopération commencèrent à aller de mal en pis. Les administrations zonales se mirent à diverger. Le 1er janvier 1947, la Grande-Bretagne et les États-Unis unifièrent leurs zones en un nouveau territoire nommé Bizonia, ce qui exacerba davantage les tensions Est-Ouest.    

Puis, en mars et avril, les minis-tres des Affaires étrangères des quatre puissances occupantes ne réussirent pas à s’accorder sur des traités de paix avec l’Allemagne et l’Autriche. Pendant ce temps, la doctrine Truman, selon laquelle les États-Unis appuieraient toute démocratie menacée par quelque entité autoritaire, exacerba encore davantage les tensions avec les Soviétiques.

L’alliance stratégique Est-Ouest de la Seconde Guerre mondiale qui avait vaincu le fascisme était irrémédiablement rompue face aux hostilités croissantes de l’après-guerre. La guerre froide commençait; le rideau de fer se concrétisait.

Des garçons font signe de la main à un avion américain livrant de la nourriture au territoire qui faisait l’objet d’un blocus des Soviétiques en 1948.
dpa picture alliance/Alamy/D3B759

Pendant ce temps, les Alliés occidentaux commencèrent à planifier une nouvelle Allemagne composée de leurs zones d’occupation. Lorsque les Soviétiques eurent connaissance de ce projet en mars 1948, ils se retirèrent du Conseil de contrôle allié qui avait été créé pour coordonner la politique d’occupation entre les zones. 

En juin, sans en informer préalablement les Soviétiques, les responsables britanniques et étasuniens introduisirent une nouvelle monnaie pour la Bizonie et Berlin-Ouest. En représailles, les Soviétiques en émirent aussi une. Les Alliés occidentaux commencèrent à craindre que leurs zones d’occupation à Berlin ne soient absorbées par l’Allemagne de l’Est que contrôlaient les Soviétiques, hostiles.

La ville avait été pilonnée par les bombardements alliés pendant la guerre, et elle était en ruines. La famine menaçait et les abris convenables étaient rares. Le marché noir avait pris le pas sur la vie économique.

Les craintes des Alliés étaient justifiées. Le 24 juin, les forces soviétiques imposèrent un blocus de toutes les liaisons par voie ferrée, par route et par canal vers Berlin-Ouest. La première crise de la guerre froide venait d’éclater. En réponse, la Grande-Bretagne et les États-Unis lancèrent un pont aérien pour le transport de nourriture et de carburant vers Berlin-Ouest à partir des bases aériennes alliées en Allemagne de l’Ouest.

La réponse au blocus de Berlin montrait à l’URSS que les Alliés pouvaient indéfiniment approvisionner la ville assiégée par avion. Le 11 mai 1949, les Soviétiques levèrent le blocus.   

Pendant ce temps, entre 1946 et 1948 et parallèlement à ces provocations, l’URSS avait soutenu les communistes partout en Europe, et ils menaçaient les gouvernements démocratiquement élus. Le résultat fut la création d’États communistes radicaux basés sur le système de gouvernement soviétique en Pologne, en Tchécoslovaquie, en Yougoslavie, en Hongrie, en Roumanie, en Bulgarie et en Albanie. 

À bien des égards, le blocus de Berlin est la goutte d’eau qui fit déborder le vase pour certains pays européens. Le 17 mars 1948, le Royaume-Uni, la France, la Belgique, les Pays-Bas et le Luxembourg signèrent le Traité de Bruxelles, une alliance établie en réponse à la demande américaine d’une plus grande coopération européenne. Le bras de sa défense était basé au château de Fontainebleau, au sud de Paris, et était dirigé par le maréchal Bernard Montgomery.

L’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN) fut créée le 4 avril 1949 devant les tensions croissantes entre l’URSS et l’Occident et la crainte d’une nouvelle expansion communiste, après le blocus de Berlin et le Traité de Bruxelles, et face à la nécessité d’un cadre de sécurité collectif contre les Soviétiques. Le Canada, les États-Unis, le Royaume-Uni, la France, la Belgique, les Pays-Bas, le Luxembourg, le Danemark, la Norvège, l’Islande, l’Italie et le Portugal étaient les premiers membres du Traité de l’Atlantique Nord, signé à Washington, D.C.

L’OTAN a été et reste l’un des traités de défense mutuelle les plus efficaces de l’histoire. Pourtant, l’opposition à la menace présentée par l’URSS n’était que l’un des trois piliers qui avaient conduit à sa création. En plus de décourager la domination soviétique, l’OTAN avait également été conçue pour empêcher une renaissance du militarisme nationaliste en Europe et soutenir l’intégration politique européenne. 

Le principe central de l’OTAN est contenu dans l’article 5 du traité : « une attaque armée contre l’une ou plusieurs […] sera considérée comme une attaque dirigée contre toutes » et chaque État membre aidera ceux qui sont attaqués en prenant « telle action qu’il jugera nécessaire, y compris l’emploi de la force armée ». 

L’accord de l’OTAN établit le plus ancien organe de l’organisation : le Conseil de l’Atlantique Nord. Ce conseil est le principal groupe décisionnel, et ses politiques reflètent la volonté collective des membres de l’OTAN.

Quatre mois après sa création, l’alliance mit en place un comité militaire chargé de fournir des conseils en matière de défense à l’organe. Le comité est l’autorité militaire supérieure de l’OTAN et dirige ses commandants stratégiques. 

Le président du comité est élu parmi les chefs de la défense des membres de l’OTAN. Le mandat était d’un an à l’origine, mais depuis 1958, il est généralement de deux ou trois ans. 

Les signataires initiaux (à l’exception de l’Islande et du Luxembourg), ainsi que certains des membres ultérieurs, ont assuré la présidence du comité. Le Canada a assuré la présidence à trois reprises.

Au départ, l’OTAN n’avait pas de structure de commandement intégrée pouvant coordonner ses activités. Cela changea radicalement à cause de l’explosion de la bombe atomique de l’URSS le 29 aout 1949 et de l’invasion de la Corée du Sud par la Corée du Nord le 25 juin 1950. 

L’OTAN établit rapidement une structure de commandement consolidée. Après quatre mois à Paris, elle bâtit de nouvelles installations près de Versailles, qu’elle appela Grand Quartier général des Puissances alliées en Europe.

Le Traité de l’Atlantique Nord, qui fut signé par le premier ministre Louis St-Laurent de la part du Canada le 30 avril 1949 (à droite).
OTAN; BAC/C-00071

Le général américain Dwight D. Eisenhower, nommé en décembre 1950, fut le premier commandant suprême des Alliés en Europe. Le poste est toujours occupé par un Étasunien, qui est également commandant du Commandement européen des États-Unis.

L’OTAN créa un secrétariat civil permanent à Paris en février 1952. Le premier secrétaire général fut l’ancien général britannique Lord Hastings Ismay, qui avait été le principal conseiller de Churchill pendant la guerre. Ismay aurait notoirement dit que l’OTAN avait été créée « to keep the Soviet Union out, the Americans in, and the Germans down » (pour tenir l’Union soviétique à l’écart, retenir les Américains et garder un joug sur les Allemands, NDT). 

Le conseil est présidé par le secrétaire général. Les secrétaires généraux proviennent de plusieurs pays, mais ils sont toujours européens.

Premier conflit important de la guerre froide, la guerre de Corée amena les pays de l’OTAN à augmenter considérablement leurs forces armées. En outre, tous les membres, à l’exception du Portugal et de l’Islande (qui n’a pas d’armée), y compris la Grèce et la Turquie qui s’y joignirent bientôt, fournissaient des ressources. Le Canada était le troisième plus grand contributeur de troupes après les États-Unis et le Royaume-Uni.

En 1952, la Grèce et la Turquie furent admises à l’OTAN, puis les suivirent l’Allemagne de l’Ouest en 1955 et l’Espagne en 1982. L’admission de l’Allemagne de l’Ouest coïncida avec la création d’une alliance régionale rivale de l’OTAN : le Pacte de Varsovie, qui se composait de l’URSS et de ses États satellites de l’Allemagne de l’Est, de la Pologne, de la Tchécoslovaquie, de la Hongrie, de la Bulgarie, de la Roumanie et de l’Albanie (qui se retira en 1968).

Bien que le pacte soit théoriquement basé sur la prise de décision collective, dans la pratique, les Soviétiques dominaient et prenaient la plupart des décisions. Le traité professait également la non-ingérence dans les affaires intérieures des États membres, mais l’URSS s’en servit pour justifier sa répression de la dissidence populaire en Hongrie en 1956, en Tchécoslovaquie en 1968 et en Pologne en 1981. 

En février 1966, le président français Charles de Gaulle annonça que la France se retirerait de la structure militaire intégrée de l’OTAN tout en restant membre de l’alliance. Cela entraina le départ des forces de l’OTAN qui étaient en France, notamment des unités de l’Aviation royale canadienne. Cela signifiait également un déménagement en Belgique : le quartier général de l’OTAN à Bruxelles, et le commandement suprême à Casteau, près de Mons.

L’OTAN réussit tout au long de la guerre froide à dissuader toute agression militaire et ses forces collectives ne participèrent à aucun engagement militaire. Mais, la fin de la guerre froide changea la donne et de nouvelles menaces apparurent aux côtés des anciennes.

L’OTAN changea en même temps que les menaces, passant d’une alliance exclusivement défensive à une alliance proactive. Entre 1990 et 1992, avant sa première opération majeure en réponse à la crise dans les Balkans, l’alliance mena plusieurs opérations militaires mineures, principalement des vols aériens du système d’alerte et de contrôle.

La chute de l’Union soviétique et des États d’Europe de l’Est dominés par les communistes conduisit les nations constitutives de la République fédérale de Yougoslavie à déclarer leur indépendance. Cela commença en juin 1991 par la Slovénie et la Croatie, puis suivirent la Bosnie-Herzégovine, la Macédoine du Nord, le Monténégro et la Serbie.     

Après l’éclatement de la Yougoslavie, l’ONU, l’OTAN et l’Union européenne fournirent des soldats de la paix. Le premier engagement de l’OTAN fut l’opération Joint Endeavour, en décembre 1995, avec la Force de mise en œuvre de 60 000 soldats. Son objectif était de faire respecter les accords de Dayton qui mettaient fin à la guerre en Bosnie.   

Parallèlement, l’OTAN opéra un blocus maritime de la région et y imposa une zone d’exclusion aérienne.  

La Force de mise en œuvre acheva ses activités en décembre 1996 et fut immédiatement remplacée par la Force de stabilisation de l’OTAN. Elle se composait d’environ 12 000 soldats qui devaient aider la Bosnie-Herzégovine à devenir un pays démocratique. L’envergure de la force fut réduite peu à peu, et la mission fut remise à l’Union européenne à la fin de 2004.

Parallèlement, à partir d’octobre 1998, l’OTAN imposa aussi une zone d’exclusion aérienne au-dessus de la Bosnie-Herzégovine. Lorsque ses avertissements furent ignorés, l’alliance lança une campagne de bombardement de 78 jours pour forcer la Serbie à cesser ses attaques contre le Kosovo.   

En juin 1999, l’OTAN institua une force de sécurité au Kosovo. Ce fut une réussite et sa taille diminue progressivement jusqu’à ce que les propres unités du pays puissent prendre le relais.

En aout 2001, l’OTAN lança une initiative d’un mois pour collecter des armes auprès de la minorité ethnique albanaise de Macédoine qui avait attaqué les forces gouvernementales.   

Le Canada a contribué à toutes les missions de l’OTAN aux Balkans. Quelque 40 000 Canadiens y ont servi pour l’OTAN, l’ONU ou l’Union européenne.

À ce jour, l’article 5 de l’OTAN n’a été invoqué qu’une seule fois. Moins de 24 heures après les attentats terroristes du 11 septembre aux États-Unis où furent tuées près de 3 000 personnes, l’OTAN invoqua la clause en solidarité avec les Américains.   

Ceux-ci lancèrent immédiatement leurs opérations en Afghanistan lorsque les talibans au pouvoir refusèrent de livrer Oussama ben Laden, le cerveau de l’attaque. Cela fut suivi par l’engagement de ressources militaires dans la guerre de plusieurs pays de l’OTAN et d’autres qui n’en étaient pas membres.

À partir d’aout 2003, l’OTAN dirigea la Force internationale d’assistance à la sécurité mandatée par l’ONU pour l’Afghanistan. Sa mission était de créer les conditions permettant au gouvernement afghan d’exercer son autorité dans tout le pays et d’accroitre les capacités de ses forces de sécurité.

Des soldats de la paix canadiens lors d’une mission de l’OTAN en Croatie.
iStock; MDN/ACC

Cette opération prit fin en décembre 2014 et le mois suivant, l’alliance commença à former les forces de sécurité afghanes pour lutter contre le terrorisme et maintenir la sécurité dans le pays. Cela prit fin en septembre 2021 lorsque l’OTAN cessa tout soutien à l’Afghanistan. 

Le Canada fournit des ressources militaires aux missions de l’OTAN en Afghanistan dès le début. Cependant, son rôle de combat prit fin en 2011, et les derniers Canadiens partirent du pays en mars 2014. Plus de 40 000 soldats, marins et aviateurs canadiens avaient servi en Afghanistan.

Aujourd’hui, les menaces posées par l’invasion russe de l’Ukraine, l’expansionnisme régional de la Chine, le terrorisme, le changement climatique, l’instabilité régionale, les progrès technologiques et la cybersécurité figurent parmi les principaux défis que doit relever l’OTAN. L’alliance a cependant réussi à réaliser son objectif de sécurité collective au cours des 75 dernières années. À cet égard, son approche partagée reste le meilleur pari pour que les pays occidentaux surmontent les éventuels problèmes à venir.

Les derniers membres de l’OTAN

L’OTAN créa le Partenariat pour la paix en 1994 pour tisser des liens entre l’alliance et les nouvelles démocraties d’Europe, en particulier les pays de l’ancienne Union soviétique.
Trente-quatre pays finirent par y adhérer, dont la Russie et les républiques constitutives de l’ancienne URSS, des membres du Pacte de Varsovie et plusieurs pays européens traditionnellement neutres. Le programme de partenariat servit à certaines nations à se joindre à l’OTAN.       

Le plus récent membre de l’OTAN est la Finlande (qui y a adhéré en 2023), tandis que la Suède devrait devenir le 32e membre de l’alliance une fois que la Hongrie aura ratifié sa demande. On compte parmi les autres nouveaux membres la Macédoine du Nord (2020), le Monténégro (2017), l’Albanie et la Croatie (2009), la Bulgarie, l’Estonie, la Lettonie, la Lituanie, la Roumanie, la Slovaquie et la Slovénie (2004), et la Tchéquie et la Hongrie (1999).

]]>
Une histoire de souvenir https://legionmagazine.com/fr/2024/04/une-histoire-de-souvenir/ Mon, 22 Apr 2024 18:55:18 +0000 https://legionmagazine.com/fr/?p=6527
Entre 300 et 400 personnes ont assisté à la cérémonie du 11 novembre à Nanton, en Alberta.
STEPHEN J. THORNE/LM

Un vent fort s’est vite levé sur la prairie albertaine dès la fin de la cérémonie du jour du Souvenir à Nanton. Plus de 10 673 aviateurs de bombardiers morts lors de la Seconde Guerre mondiale, aux noms gravés sur un mémorial en granit noir, ont pu reposer en paix : on ne décollerait pas ce jour-là.

De gros nuages noirs stagnaient au-dessus des pics enneigés des Rocheuses à quelques dizaines de kilomètres à l’ouest, tandis qu’un véritable enfer se déchainait à Nanton.

Les drapeaux d’apparat claquaient au garde-à-vous avant de s’incliner et de basculer, les couronnes virevoltaient sur la pelouse devant le cénotaphe de la ville comme des boules d’herbes mortes et, le long de l’autoroute 2 qui mène à Calgary 92 kilomètres plus au nord, des voitures déviaient sur le bas-côté tandis que des panneaux de signa-lisation se cassaient en deux.

Tout ce grabuge ne semblait pas troubler les 300 à 400 personnes pressées autour du ssoldat en marbre blanc érigé sur une base en granit grise, tel un ange gardien.Sur ce monument sont inscrits les noms de 25 hommes de la région qui ont péri lors de la Première Guerre mondiale, dont sept qui ont combattu sur la crête de Vimy, et ceux de 24 autres qui ont perdu la vie lors de la Seconde Guerre mondiale.

Après la cérémonie commémorative, beaucoup de gens ont marché jusqu’au mémorial du Bomber Command, longeant son mur et passant les noms en revue. Certains se sont aventurés dans le Musée du Bomber Command du Canada. Malgré le vent, d’autres se sont attardés au monument et sur les noms.

Parmi eux se trouvait David (dont le nom de famille ne sera pas mentionné) qui a montré le nom de Harry Llewellyn Davis à sa tante, Colleen Oshanek.

Andrew Mynarski, récipiendaire de la Croix de Victoria, fait partie des quelque 10 700 noms inscrits sur le monument commémoratif du Bomber Command du Canada.
STEPHEN J. THORNE/LM
David montre le nom de Harry Davis à Colleen Oshanek (en bas à gauche). Les Calgariens Sam et Alexandra Dodd (en bas à droite) assistent à l’événement chaque année ; son grand-père, le lieutenant d’aviation Donald Sanders de Salter, en Saskatchewan, a piloté des bombardiers Halifax, Wellington et Lancaster.
STEPHEN J. THORNE/LM

Le sous-officier breveté de 2e classe Davis, mitrailleur de queue d’un bombardier bimoteur Wellington HE 568 de la 420e Escadrille de l’ARC, était l’oncle de Mme Oshanek. Ce jeune agriculteur d’Acme, Alb., au nord-est de Calgary, a été porté disparu le jour de la naissance de celle-ci, le 1er juin 1943. Il avait 24 ans.

« Je ne l’ai jamais connu », confie Mme Oshanek, qui a entendu parler de son oncle Harry pendant toute son enfance en ignorant presque tout de son histoire.

Son avion était l’un des 20 Wellington qui avaient quitté la Royal Air Force Portreath de Cornwall, en Angleterre, pour gagner la nouvelle base de Ras El Maa, au Maroc. Ils devaient joindre la campagne de bombardement précédant l’invasion de la Sicile, de l’Italie continentale et d’iles aux mains de l’Axe.

L’Afrika Korps, ainsi que les forces de Panzer commandées par le Renard du désert, le Generalfeldmarshchall Erwin Rommel, venaient de s’incliner devant la 8e Armée du lieutenant-général Bernard Montgomery en Afrique du Nord. La campagne d’Europe allait commencer.

Deux des Wellington ne sont jamais arrivés, interceptés au-dessus du golfe de Gascogne par cinq appareils de combat lourds Ju 88 basés à Lorient, en France. L’avion de Davis fut abattu par l’oberleutnant Hermann Horstmann, chef de l’escadrille 13/KG 40 de la Luftwaffe. Il était 8 h 05.

Les sept personnes à bord du Wellington furent tuées, y compris deux membres d’équipe au sol qui profitaient du vol pour gagner la nouvelle base. En plus de Davis, il s’agissait du sergent de section Alexander Theodore Sodero, pilote âgé de 21 ans de Sydney, N.-É.; du lieutenant d’aviation George Henry Hubbell, navigateur de 32 ans d’Arnprior, Ont.; du lieutenant d’aviation William Robert King, viseur de lance-bombes de 22 ans de Kingston, Ont.; du lieutenant d’aviation Robert Spencer Hollowell, radiotélégraphiste et mitrailleur de bord de 24 ans de Wolseley, Sask.; et des deux membres d’équipe au sol, l’aviateur-chef Thomas Robert Brookes de 23 ans de Montréal et le caporal James Foster MacKenzie de 34 ans, de Red Deer, Alb.

J’ai vu l’artilleur arrière sauter, mais son parachute brulait aussi. Nous n’avons vu aucun survivant; seulement des débris.

Quelques minutes après, les Allemands attaquèrent un autre avion, le Wellington HE 961 piloté par Gordon Saunders McCulloch, lieutenant d’aviation de 29 ans qui venait d’Hamilton. Il y avait aussi à bord les quatre membres de son personnel navigant et deux membres d’équipe au sol.

Les couronnes ne manquaient pas pour la cérémonie de Nanton.
STEPHEN J. THORNE/LM
Les membres de la section canadienne du Nam Knights Motorcycle Club ont déposé une couronne au nom des Canadiens qui ont servi dans les forces américaines au Vietnam.
STEPHEN J. THORNE/LM

« J’ai dû cesser ma première attaque parce que l’avion ennemi faisait des manœuvres d’évitement et que je me suis retrouvé dans le champ de tir de la mitrailleuse de sa tourelle arrière », a rapporté l’unteroffizier Heinz Hommel, rottenlieger (ailier) de Horstmann.

« Une balle a atteint l’aile gauche de mon avion pendant le premier combat. Peu après, j’ai réussi à me placer en bonne position et j’ai attaqué droit devant d’en haut, et j’ai vu les coups de canon et de mitrailleuse toucher l’aile droite de l’avion ennemi, a déclaré Hommel. À 100 mètres de distance, j’ai vu de grandes flammes sortir de l’aile droite et prendre de l’ampleur.

Peu après, toute l’aile était en feu, puis elle s’est sectionnée. L’avion est tombé en vrille et a explosé en touchant l’eau. J’ai vu l’artilleur arrière sauter, mais son parachute brulait aussi. Nous n’avons vu aucun survivant; seulement des débris. »

En effet, les dépouilles des deux aviateurs et de leurs passagers n’ont jamais été retrouvées. Leurs noms sont inscrits sur le monument devant le musée de Nanton.

Ils sont aussi sur la liste du mémorial Runnymede, à l’ouest de Londres. On y trouve les noms de 20 450 aviateurs du Commonwealth, dont 3 050 Canadiens, dont la tombe est inconnue. Horstmann fut tué au combat au mois de décembre suivant; Hommel fut blessé quelques semaines avant la fin de la guerre.

Nanton se trouve au cœur de la région du Programme d’entrainement aérien du Commonwealth britannique, dont ont profité 131 500 aviateurs dans 107 écoles et 184 unités de soutien aux quatre coins du Canada.

L’École élémentaire de pilotage no 5 était à 28 kilomètres au nord de Nanton, à High River. À Vulcan, à 40 kilomètres à l’est, se trouvait l’école de pilotage militaire no 19, et au début, la Flying Instructor School no 2. L’École de pilotage militaire no 15 était située à Claresholm, à 40 kilomètres au sud. Elles faisaient partie d’une bonne douzaine des lieux d’instruction du programme qu’il y avait rien qu’en Alberta.

Pendant les années de guerre, de nombreux avions-écoles de couleur « jaune PEACB », pilotés par des recrues du Canada, de Grande-Bretagne, d’Australie et de Nouvelle-Zélande, passaient au-dessus des Prairies, et notamment de Nanton.

Dans son livre A Thousand Shall Fall (Mille tomberont, NDT), Murray Peden explique qu’il réservait des séances en solo en même temps que son ami Francis Plate, et qu’ils s’organisaient pour se rencontrer « au-dessus d’une ville dans le coin où on faisait de la voltige, souvent Nanton » et que « chacun s’efforçait de surpasser la performance de l’autre ».

La ville d’environ 2 200 habitants est nichée au milieu d’exploitations agricoles et de terres d’élevage vallonnées. La petite filiale de la Légion royale canadienne n’y compte que 39 membres, dont quelques vétérans du maintien de la paix du temps de la guerre froide. Ils ont 70 ans en moyenne et ont enterré leur dernier vétéran de la Seconde Guerre mondiale, un marin, il y a quelques années.

Bruce Beswick a piloté des Buffalo, des F-5 et des CF-18 au cours de sa carrière de 25 ans dans l’Aviation royale canadienne.
STEPHEN J. THORNE/LM

La filiale de la Légion de Nanton, établie en 1919 lorsque l’organisation s’appelait Great War Veterans Association, n’a jamais eu son propre édifice. Actuellement, elle n’a pas de lieu à elle. Les réunions ont toutefois lieu une fois par mois au Town & Country Kozy Korner, le centre pour ainés qui jouxte le musée.

« Le jour du Souvenir a fait notre réputation », souligne Marylou Slumskie, secrétaire-trésorière de la filiale, fille d’un vétéran de la Seconde Guerre mondiale et nièce d’un autre, qui est lui-même trésorier du Kozy Korner. « La ville compte sur nous pour sa planification, son organisation et son déroulement.

Le Musée du Bomber Command nous a généreusement permis de former les rangs ici, de nous rassembler et de nous préparer avant d’aller au cénotaphe. »

A mom and her children huddle against the prairie wind.
STEPHEN J. THORNE/LM

En fait, les membres de la Légion sont très bien intégrés au musée et à ses activités. Ainsi, ils tiennent un stand aux évènements habituels où ils exposent l’un des 17 derniers bombardiers Avro Lancaster au monde : deux peuvent encore voler, mais pas celui-là. Toutefois, ses quatre moteurs Rolls-Royce Merlin qui fonctionnent encore sont d’une extrême rareté.

« Le jour du Souvenir a fait notre réputation », souligne Marylou Slumskie, secrétaire-trésorière de la filiale, fille d’un vétéran de la Seconde Guerre mondiale et nièce d’un autre.

Au contraire des Lancaster qui volent encore, celui de Nanton a gardé sa configuration intérieure du temps de guerre, avec un poste de radio-télégraphie, un habitacle à un seul siège et d’autres détails.

L’avion porte les marques FM 159 (F2-T) du commandant d’aviation Ian Bazalgette, Calgarien à qui fut décernée la Croix de Victoria de façon posthume. Il est décédé le 4 aout 1944 en faisant atterrir son avion endommagé, mais il a sauvé deux des membres de son équipage blessés.

Karl Kjarsgaard, époux de Mme Slumskie et conservateur du musée, dit de la filiale de la Légion que c’est « le bras droit » du musée.

Brian Stapley, président de la filiale, mais aussi plombier, monteur d’installations au gaz et monteur de conduites de vapeur à la retraite, et ancien président du Kozy Korner, habite à Nanton depuis toujours. Et il en allait de même pour son père, Lawrence, sapeur de combat pendant la Seconde Guerre mondiale. Sa mère était une épouse de guerre. Les deux étaient membres de la Légion.

Comment réussissaient-ils à garder la filiale ouverte? « Avec beaucoup de peine », avoue M. Stapley.

Dans le cimetière local gisent 215 anciens combattants. Chaque année, les élèves de 9e année de la localité aident les légionnaires à mettre une croix blanche et un coquelicot à côté de chacune des pierres tombales. Le plus vieux des caveaux est le lieu de repos de Hans Henry Anderson, vétéran de la guerre hispano-américaine de 1898. Ni les Américains ni le fonds Last Post ne lui ont procuré de stèle, alors la Légion lui en a acheté une en utilisant des fonds de son casino.

La Légion a ajouté des plaques de GRC, de maintien de la paix et d’Afghanistan à celles des guerres mondiales et de la guerre de Corée qui s’y trouvaient déjà. En 2017, lors du 100e anniversaire de la plus fameuse des batailles du Canada, les légionnaires de Nanton ont dévoilé un banc commémoratif de Vimy près du cénotaphe. Et il y a neuf ans, ils ont acquis un jeune arbre descendant d’un des célèbres chênes de Vimy et l’ont planté près du monument.

« Il peine dans le climat albertain, mais il s’accroche, » a souligné Mme Slumskie.

]]>
Rapport de situation sur l’inconduite sexuelle dans les Forces https://legionmagazine.com/fr/2024/04/rapport-de-situation-sur-linconduite-sexuelle-dans-les-forces/ Mon, 22 Apr 2024 18:35:31 +0000 https://legionmagazine.com/fr/?p=6525 Les affaires d’inconduite sexuelle qui secouent les Forces armées canadiennes ont fait du chemin depuis les révélations alarmantes dans les médias il y a trois ans. Elles sont désormais au cœur des tribunaux, des milieux de travail de l’armée et de la scène politique.

Il reste encore beaucoup à faire pour mettre en œuvre les 48 recommandations résultant de l’examen externe complet et indépendant effectué en 2022 par l’ancienne juge de la Cour suprême Louise Arbour, mais l’année 2023 a été jalonnée d’importantes mesures et leçons.

Bill Blair, ministre de la Défense, a annoncé en aout dernier que le règlement sur le devoir de si-gnaler les agressions et l’inconduite sexuelles serait abrogé cet hiver. Ce règlement privait les survi-vantes et survivants de tout contrôle sur la dénonciation et créait un dilemme moral pour les témoins, censés signaler les faits même si les survivantes et survivants ne le souhaitaient pas.

Ce changement ne restreindra pas les possibilités de signalement, mais il permettra aux militaires de « choisir la meilleure voie à suivre, tout en prenant dument en considération le bienêtre des personnes touchées », a déclaré la lieutenante-générale Jennie Carignan, chef – Conduite personnelle et culture.

Dans la foulée, M. Blair a annoncé que les membres des FAC étaient libres de déposer une plainte pour harcèlement sexuel ou discrimination fondée sur le sexe devant la Commission canadienne des droits de la personne ou dans le cadre d’un processus de règlement de grief des FAC.

Parmi les leçons retenues dans la tentative de l’armée de lutter contre les problèmes d’inconduite sexuelle, on note la difficulté de transférer aux systèmes de justice civils les enquêtes et les poursuites judiciaires dans les affaires d’agression sexuelle, comme le recommandait Mme Arbour dans son rapport. Le ministère de la Défense travaille au transfert avec les gouvernements provinciaux et territoriaux, mais certains secteurs de compétence, déjà surchargés, sont réticents à assumer cette charge de travail supplémentaire.

En date de mai 2023, l’armée avait adressé 93 affaires à d’autres forces de police, mais 29 avaient été refusées.

En date de mai 2023, l’armée avait adressé 93 affaires à d’autres forces de police, mais 29 avaient été refusées. En aout 2023, le juge d’un tribunal civil a suspendu les accusations dans l’une des premières affaires transférées aux tribunaux civils : elles enfreignaient les droits de la personne accusée à un procès dans un délai raisonnable, comme le garantit la Charte des droits et libertés du Canada. Les affaires devant les tribunaux provinciaux doivent être jugées dans les 18 mois suivant la mise en accusation. Or, le délai avait commencé à courir dès les accusations portées dans le système militaire, explique Alan Okros, professeur au Collège militaire royal de Kingston, Ont., qui fait des recherches sur le commandement, l’égalité des genres et la diversité.

« Mais le système civil doit quand même faire preuve de la diligence appropriée avant de procéder », ajoute-t-il.

Certaines affaires très média-tisées avec la mise en cause de hauts gradés accusés d’agression ou d’inconduite sexuelles en 2021 sont arrivées devant les cours martiales et civiles.

Le vice-amiral Haydn Edmundson, accusé d’une agression sexuelle en 1991, a plaidé non coupable. Son procès au civil aura lieu en 2024.

Le lieutenant-général Steven Whelan est passé devant la cour martiale en octobre 2023, car il aurait eu une relation déplacée avec une subalterne et aurait modifié son évaluation de rendement. L’affaire a été retirée après que les courriels de preuve aient été jugés irrecevables.

L’ancien chef d’état-major de la défense Jonathan Vance a plaidé coupable d’entrave à la justice devant un tribunal civil en 2022. Il a fait l’objet d’une absolution sous conditions dans le cadre de l’enquête sur des allégations d’une relation déplacée avec une subalterne et d’ingérence dans sa carrière.

En revanche, le Service national des enquêtes des Forces canadiennes n’a pas trouvé suffisamment de preuves pour porter des accusations en vertu du Code criminel ou du code du service militaire contre le vice-amiral Art McDonald, accusé d’inconduite sexuelle et relevé de son commandement en 2021. Toutefois, selon le Service, cela n’entache pas le fondement de l’allégation.

Voici d’autres faits nouveaux : la commission de révision du Collège militaire a entamé son examen de l’éducation militaire; une augmentation de financement doit fournir au personnel militaire davantage de centres d’aide aux victimes d’agression sexuelle dans les collectivités du pays; le Centre de soutien et de ressources sur l’inconduite sexuelle a été délesté de ses responsabilités à l’égard de la surveillance et de l’instruction et a été recentré sur l’aide aux survivantes et survivants, notamment les anciens combattants, les employés du ministère de la Défense et leurs proches, ainsi que sur les recherches sur la prévention de tels actes (le Centre a établi un fonds pour offrir des conseils juridiques et de l’aide pour financer les frais de justice, il a également commencé à faire des recherches sur les personnes qui commettent des actes d’inconduite sexuelle afin d’élaborer des mesures préventives); l’armée, qui finance des recherches universitaires sur l’inconduite sexuelle depuis des années, a mis ses rapports d’étude internes à la disposition des universitaires pour éviter la duplication du travail.

Jocelyne Therrien, la surveillante externe chargée de superviser la mise en œuvre des recommandations de Mme Arbour, a présenté son premier rapport en mai 2023.

Malgré de nombreuses avancées, l’armée manque de « plan stratégique global » qui « permettrait de garantir que les ressources sont harmonisées aux priorités ». Au lieu de cela, dit-elle, le programme militaire est tributaire de la disponibilité des ressources et des questions de capacité.

Elle a aussi souligné de nombreux progrès.

Le bureau de la chef – Conduite personnelle et culture « joue un rôle décisif » en fournissant aux commandants d’unité « un endroit où ils peuvent obtenir des conseils sur la façon de composer avec les situations qui se présentent. »

Ce changement ne restreindra pas les possibilités de signalement, mais il permettra aux militaires de « choisir la meilleure voie à suivre, tout en prenant dument en considération le bien être des personnes touchées ».

Parallèlement, la chef a mis sur pied une formation sur l’inconduite sexuelle et la conduite haineuse, la diversité, l’équité et l’inclusion qui sera offerte à tous les militaires tout au long de leur carrière. Mme Therrien a également noté que la sélection des recrues et le traitement de leur comportement se sont améliorés.

« La sélection de recrues qui incarnent un éthos inclusif est l’une des façons d’obtenir, en fin de compte, un milieu de travail exempt de harcèlement, tout comme la libération rapide des personnes qui ont un comportement inacceptable », a-t-elle avancé dans son rapport.

En attendant les changements législatifs et règlementaires permettant l’institution d’une période d’essai, les FAC étudient des moyens de trier les recrues et décharger de l’instruction de base celles qui « présentent un comportement et des attitudes problématiques » comme le sexisme et le racisme.

En outre, les dirigeants de l’École de leadership et de recrues des Forces canadiennes, qui est chargée de l’instruction de base de quelque 5 000 recrues par année, ont modifié ses programmes afin d’« appuyer un apprentissage plus robuste des valeurs et de l’éthique des FAC ».

« J’ai été témoin d’un nombre important d’activités concrètes au sein du MDN et des FAC dans leur réponse aux centaines de recommandations provenant des examens externes, a écrit Mme Therrien.

« Le défi est de gérer les projets et les initiatives de façon à prioriser les changements qui amènent une réforme fondamentale en temps opportun. »

Le succès pourra se mesurer par la baisse du nombre d’agressions ou d’inconduites sexuelles et les constatations des employés du ministère de la Défense et des militaires à cet égard.

« Il est encore trop tôt pour savoir si c’est en cours », a conclu Mme Therrien.

Elle devrait déposer son deux-ième rapport après la publication de ce numéro.

]]>
Le gouvernement néglige le sort des interprètes afghans, dit l’ombudsman https://legionmagazine.com/fr/2024/04/le-gouvernement-neglige-le-sort-des-interpretes-afghans-dit-lombudsman/ Mon, 22 Apr 2024 18:07:34 +0000 https://legionmagazine.com/fr/?p=6522
Le capitaine Alex Watson s’entretient avec des villageois par l’intermédiaire d’un interprète dont le visage est dissimulé pour le protéger des représailles.

L’ombudsman du MDN/FAC condamne le gouvernement fédéral et l’accuse de négliger le sort des anciens interprètes afghans qui ont risqué leur vie et celle de leurs proches en travaillant aux côtés des Forces armées canadiennes pendant les 13 années de la guerre.

Dans une lettre adressée à Bill Blair, ministre de la Défense, Gregory Lick note que depuis juillet, 15 anciens « conseillers linguistiques et culturels » (CLC) vivant désormais au Canada ont contacté son bureau pour se plaindre que leurs demandes soumises à la Commission de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail (CSPAAT) de l’Ontario n’ont pas été bien réglées.

« À ce jour, leurs efforts pour obtenir un traitement et des soins pour leurs besoins mentaux et physiques subis en soutenant nos troupes se sont heurtés à l’inaction, a-t-il écrit dans la lettre publiée sur le site Web de l’ombudsman. Les traitements médicaux et les compensations financières pour les blessures ont été inadéquats ou inexistants. »

« Beaucoup d’entre eux ont servi plus de cinq ans “sans pause ni relève” ».

De nombreux Afghans et quelques Pakistanais ont servi d’interprètes et de conseillers à plusieurs périodes entre décembre 2001, quand sont arrivés les premiers soldats des forces spéciales du pays dans la zone de guerre, et mars 2014, quand la mission a pris fin et que le dernier cadre instructeur est parti. Le Canada a retiré ses troupes de combat en 2011.

Beaucoup de ces CLC, ainsi que leurs proches, ont subi des menaces pendant leur service. Plusieurs ont été tués ou blessés par les talibans; d’autres ont été confrontés à de multiples problèmes mentaux et physiques.

Ottawa a d’abord offert d’ac-cueillir les CLC qui pouvaient prouver avoir reçu des menaces en raison de leur travail pour le Canada. Environ 800 interprètes et leurs proches sont venus au Canada avant la fin du programme en 2011, rejoints par 7 500 autres après la fin de la guerre et la victoire des talibans en octobre 2021.

Certains interprètes ont passé plus de temps au cœur des opérations de combat que les soldats pour lesquels ils travaillaient. Leur mission était périlleuse, car ils recueillaient des rensei-
gnements, surveillaient les communications, avertissaient des attaques imminentes et aidaient les commandants à comprendre la culture locale. Cependant, ils étaient agents contractuels et n’avaient pas droit aux avantages habituels du gouvernement fédéral pour ce type de contrat, même si la plupart sont plus tard devenus citoyens canadiens.

« Bien qu’une procédure d’appel soit en cours pour certains d’entre eux, a écrit M. Lick, les faits de cette affaire démontrent un manque de soutien de la part du gouvernement pour ces Canadiens. Cette affaire est sur le point de devenir un chapitre honteux de l’histoire militaire du Canada.

« La prise en charge de ces anciens conseillers linguistiques et culturels est une obligation morale, et leur bien être relève de la responsabilité du gouver-nement du Canada. »

M. Lick note que c’est le service de renseignement militaire qui les a recrutés, et que les soldats qui servaient à leurs côtés ont souligné leur rôle essentiel dans les opérations. Il explique que beaucoup d’entre eux ont servi plus de cinq ans « sans pause ni relève », et que divers commandants de force opérationnelle leur ont décerné des honneurs et mentions élogieuses.

Watson (troisième militaire à partir de la gauche) et d’autres membres du 3e Groupement tactique du PPCLI parlent avec des villageois près de Kandahar en 2002. Le visage de l’intermédiaire est dissimulé pour le protéger des représailles.

On leur avait dit au début qu’ils travailleraient en relative sécurité sur le terrain d’aviation de Kandahar, explique M. Lick, mais « au bout de quelques jours », ils se sont retrouvés dans des bases d’opérations avancées, des villages, des convois et des zones de combats.

« Connaissant les risques inhérents à leur travail essentiel de soutien des membres des FAC déployés, des efforts appropriés n’ont pas été entrepris pour s’assurer du bien être des CLC après le déploiement », a écrit l’ombudsman.

« Nous savons qu’ils ont travaillé pour nous, et nous voulons leur apporter toute l’aide possible. »

« Malgré les efforts déployés par le sous-ministre adjoint des ressources humaines (civiles) de Direction Santé globale pour aider ces anciens CLC en validant la nature de leur travail spécialisé et dangereux, les décisions de la CSPAAT ont jusqu’à présent été défavorables aux CLC et pourraient indiquer que la CSPAAT n’est pas calibrée de manière adéquate pour ces délibérations. »

M. Lick a déclaré que la couverture médiatique et la réaction générale avaient révélé un appui « enthousiaste » de la population ainsi que du personnel subalterne pour le sort des interprètes.

« Malgré les efforts récents du ministère pour fournir une validation à la CSPAAT à l’appui de leurs demandes, aucune aide significative n’a été apportée. Laisser cette question en suspens ne sert ni le gouvernement du Canada, ni les anciens CLC, ni les intérêts des Canadiens. »

Les gestionnaires de cas du
CSPAAT ont balayé les évaluations de psychiatres et de travailleurs sociaux en rejetant les demandes de prestations de plus d’une douzaine d’interprètes au printemps dernier.

La commission a par la suite accepté de revoir les cas. Un porte-parole de la CSPAAT a déclaré à la CBC que l’organisme traitait 17 demandes concernant d’anciens CLC. L’ombudsman est en relation avec 15 d’entre eux.

« Nous travaillons aussi vite et aussi rigoureusement que possible, a déclaré à CBC News Christine Arnott, directrice des Affaires publiques de la CSPAAT. Parfois, rendre une décision peut prendre plus de temps que nous le souhaiterions, car nous devons obtenir des renseignements pertinents qui remontent à des années sur le dossier médical et professionnel. »

Mme Arnott assure que les décisions seront prises avant Noël et qu’elles seront accompagnées d’explications à l’attention des conseillers.

Le ministre a déclaré qu’il avait rencontré l’ombudsman et qu’il cherchait une solution.

« Nous savons qu’ils ont travaillé pour nous, et nous voulons leur apporter toute l’aide possible. »

Le gouvernement fédéral prévoyait de faire venir un total de 40 000 Afghans entre aout 2021 et fin 2023. Selon les chiffres les plus récents, 37 000 ont gagné le Canada.

]]>
Le Canada devrait-il avoir des sous-marins nucléaires? https://legionmagazine.com/fr/2024/04/le-canada-devrait-il-avoir-des-sous-marins-nucleaires/ Mon, 22 Apr 2024 18:02:45 +0000 https://legionmagazine.com/fr/?p=6518

Peggy Mason dit que  NON

Le Canada ne devrait pas suivre l’Australie dans sa décision d’acquérir des sous-marins américains à propulsion nucléaire. Cet encouragement horriblement cher à la prolifération nucléaire mine la souveraineté. De plus, le Canada risque de s’engluer davantage dans la stratégie américaine aussi irréfléchie qu’agressive de l’endiguement de la Chine.

Le Canada, tout comme l’Australie, est un État non doté d’armes nucléaires (ENDAN) signataire du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires. En vertu du Traité, l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) donne l’assurance que ces États ne mènent que des activités nucléaires pacifiques, car toute utilisation du nucléaire à des fins militaires est interdite aux ENDAN. Toutefois, il existe une exception, un « vide flagrant et inquiétant » dans les garanties de l’AIEA qui leur permet de soustraire les matières nucléaires à la surveillance internationale pendant la durée de leur utilisation dans les réacteurs navals.

IL SERAIT ABSURDE QUE LE CANADA ENVISAGE DE CONSACRER UNE SI GRANDE PART DE SON BUDGET MILITAIRE AUX SOUS-MARINS À PROPULSION NUCLÉAIRE.

Les submersibles nucléaires américains sont alimentés par de l’uranium hautement enrichi, matériau qui peut être utilisé dans les ogives. Ni le Canada ni l’Australie ne détourneraient l’uranium enrichi de la propulsion navale, là n’est pas le problème. Mais, des pays à l’ambition de puissances nucléaires le pourraient, sans que les inspecteurs de l’AIEA y aient accès.

Ensuite, il y a le cout exorbitant. Le Canada a déclaré qu’il lui faudrait jusqu’à 12 sous-marins à propulsion conventionnelle qui couteraient 60 milliards de dollars. Dans le cadre du partenariat trilatéral de sécurité AUKUS entre les États-Unis, le Royaume-Uni et l’Australie, cette dernière achètera jusqu’à huit sous-marins nucléaires américains à un prix entre 268 et 368 milliards de dollars. Le budget de l’approvisionnement militaire n’est presque jamais respecté, surtout lors de grands projets.

La façon dont Gareth Evans, l’ancien ministre australien des Affaires étrangères, a posé le problème de la souveraineté s’applique également au Canada : « en s’attelant aussi fermement à une telle technologie […], l’Australie a, en fin de compte, abandonné sa capacité de juge-ment souverain indépendant.

« Non seulement dans l’usage de cette nouvelle capacité, a-t-il poursuivi, mais aussi dans sa réponse aux futurs appels américains à un soutien militaire. »

L’importance pour le Canada d’agir avec une certaine indépendance sur la scène internationale prend tout son poids à la lumière du dernier argument contre l’acquisition : le risque de l’engluer davantage dans la stratégie déstabilisatrice de l’Amérique contre la Chine dans le Pacifique occidental.

Le Canada participe déjà à des opérations américaines de liberté de navigation et à d’autres exercices dans des zones proches de la côte chinoise. L’acquisition de sous-marins à propulsion nucléaire américains risque d’accroitre sa participation à cet effort, et ce, au moment où des stratèges américains progressistes exhortent l’administration du président Joe Biden à adopter une posture défensive de « déni actif » qui dissuaderait toute agression chinoise potentielle tout en limitant les risques d’escalade.

Le Canada ne devrait pas suivre les traces malavisées de l’Australie et chercher à acquérir cet équipement militaire terriblement dispendieux qui favorise la prolifération et qui compromet la souveraineté et la sécurité.

 

Michael A. Smith dit que OUI

À l’approche du
deuxième quart du XXIe siècle, le Canada doit clairement établir ses priorités pour un monde en mutation. L’Arctique et la souveraineté marine devraient figurer en bonne place sur la liste des nombreux domaines dans lesquels le pays doit investir. La Terre se réchauffe et la surveillance de la région polaire boréale est essentielle à un avenir prospère et sûr. La Russie empiète déjà sur le Nord canadien avec ses propres sous-marins nucléaires et capteurs sous-marins, essayant de saper la souveraineté du Canada, tandis que la Chine menace de s’étendre dans le Pacifique. Le Canada a trois vastes côtes à surveiller, des provinces maritimes jusqu’au littoral de la Colombie-Britannique dans le Pacifique, en passant par l’Arctique, et un seul moyen convient : le sous-marin nucléaire.

La population pourrait penser que le Canada dispose déjà d’une flotte de sous-marins, et qu’il n’a donc pas besoin de ce nouvel achat si couteux. Eh bien, les engins actuels ne suffisent pas à la mission à accomplir. Les sous-marins canadiens de la classe Victoria existants, achetés à la Grande-Bretagne en 1998, ont été construits dans les années 1980. Et depuis, le pays a dépensé des milliards pour les réparer. En outre, parler de flotte donne l’impression qu’ils sont prêts à tout moment. Or, ce n’est pas le cas : un seul est opérationnel. De plus, ils devraient également être retirés du service dans les années 2030, donc le Canada doit bientôt décider de la prochaine étape.

DE TELS NAVIRES PERMETTRAIENT AU CANADA DE SURVEILLER SES EAUX PLUS LIBREMENT.

Bien sûr, la nécessité de remplacer les navires actuels ne motive pas seule l’option nucléaire. Mais, le vaste littoral vulnérable du Canada, le plus long du monde, si. Les sous-marins nucléaires peuvent rester submergés pendant environ 20 ans (!) sans ravitaillement en carburant : les seuls obstacles sont la nourriture, les fournitures et le fait qu’il serait inhumain d’obliger les marins à rester sous l’eau aussi longtemps. Toutefois, de tels navires permettraient au Canada de surveiller ses eaux plus librement, d’atteindre des profondeurs actuellement inaccessibles et de cartographier les passages arctiques émergents à mesure que la glace polaire fond.

Non seulement le Canada devrait améliorer ses capacités de défense intérieure, mais il devrait collaborer avec ses alliés. La réputation internationale de l’armée canadienne se ternit. Le pays échoue systématiquement dans l’objectif de l’OTAN de 2 % du produit intérieur brut pour les dépenses – le Canada dépense environ 1,3 % –, et il a été exclu d’importants partenariats internationaux en matière de sécurité, tels que la nouvelle coalition Australie-États-Unis-Royaume-Uni. Cette dernière, appelée AUKUS, s’efforce de sécuriser l’Indo-Pacifique dans le cadre d’une coopération stratégique et d’échanges de renseignements ainsi que, notamment, en facilitant l’achat de sous-marins nucléaires par la première. Le Canada n’aurait-il pas pu alourdir un peu la commande?

En mars 2023, Anita Anand, alors ministre de la Défense, a déclaré que le Canada ne faisait pas partie de la coalition AUKUS en raison de son manque d’intérêt pour l’obtention de sous-marins nucléaires. Cette décision restreint fatalement les capacités de renseignement du pays. Le Canada ne remplit pas son contrat à cet égard, et les autres pays le remarquent.

Le gouvernement fédéral économise peut-être l’argent des contribuables, mais les Canadiens le paieront d’une manière ou d’une autre si la souveraineté marine et arctique du pays est menacée pendant qu’ils dorment.

]]>
Service Secret : Quand deux Canadiens francophones menèrent un réseau d’évasion en Europe lors de l’occupation nazie https://legionmagazine.com/fr/2024/04/service-secret-quand-deux-canadiens-francophones-menerent-un-reseau-devasion-en-europe-lors-de-loccupation-nazie/ Mon, 22 Apr 2024 17:51:35 +0000 https://legionmagazine.com/fr/?p=6515
Fausses cartes d’identité de Raymond LaBrosse (à gauche) et de Lucien Dumais.
Anciens combattants Canada/rcsigs.ca; The Man Who Went Back
Le MI9 était le service de renseignement militaire qui avait pour mission de ramener en Grande-Bretagne les prisonniers alliés évadés et les aviateurs qui s’étaient écrasés en Europe, alors occupée par les nazis. Il s’agissait d’un travail extrêmement dangereux pour les agents du service et pour leur réseau de partisans. Les opérations en France étaient dévolues à des agents qui parlaient français, et parmi les recrues du MI9 les plus accomplies se trouvaient deux braves volontaires canadiens-français.

Le Montréalais Lucien Dumais était un sergent à l’esprit vif de 38 ans. Membre des Fusiliers Mont-Royal et capturé en aout 1942 lors du raid de Dieppe, il s’était échappé du train qui le conduisait à un camp de prisonniers de guerre. Une fois revenu en Angleterre, il s’était porté volontaire pour servir au sein du MI9.

L’Ottavien Raymond LaBrosse, sans-filiste du Corps royal canadien des transmissions, était parti outre-mer en 1940 au jeune âge de 19 ans. Le service de renseignement avait bien noté sa compétence professionnelle convoitée et son bilinguisme, et le jeune homme, aussi calme que hardi, se porta également volontaire pour les opérations en France.

En février 1943, il avait été parachuté avec un compagnon aux abords de Paris. Ils avaient pour tâche d’organiser un groupe d’agents et une route secrète

vers la côte pour les soldats et aviateurs alliés fuyant les Allemands. Mais, la Gestapo avait infiltré la filière au bout de quelques mois à peine. LaBrosse put s’enfuir et retourner en Grande-Bretagne en passant par l’Espagne, puis par Gibraltar.

À la fin du mois de mars 1944, l’opération Bonaparte avait pu faire quitter le continent à 128 aviateurs (dont 94 Américains).

LaBrosse fut promu lieutenant cet été-là, et on lui adjoignit Dumais pour établir une nouvelle filière d’exfiltration. Eux qui avaient déjà échappé aux Allemands allaient risquer à nouveau leur vie pour appuyer d’autres évasions. « Nous avons tout de suite été une équipe soudée », a souligné LaBrosse.

L’organisation du duo, du nom de code Bonaparte, faisait partie du réseau d’exfiltration « Shelburne » du MI9, et c’est celle qui eut le plus de succès en France.

Un train logistique allemand dérailla près d’Abbeville, France, en septembre 1944. Des agents secrets canadiens coopéraient avec les résistants français à de telles missions de sabotage.
Donald I. Grant/MDN/BAC/PA-115860

Les deux Canadiens furent méticuleusement formés aux opérations clandestines, et on leur donna des pseudonymes et de faux papiers d’identité. LaBrosse s’occupait de la radio, camouflée en valise par précaution, et il assurait la communication avec le MI9.

Un avion Lysander les largua au-dessus d’un champ à l’ouest de Paris en novembre 1943. Armés de pistolets, ils disposaient d’une belle somme, de cartes routières et même de tickets du métro de Paris. Leur accent canadien pouvait être pris pour du patois régional. « Ce à quoi il fallait faire très attention, a évoqué LaBrosse des années plus tard, c’était d’employer ni argot ni expressions en français canadien. »

LaBrosse et Dumais prirent contact avec des membres de la résistance française et d’autres courageux citoyens qui offraient des maisons sures, des vivres et des vêtements aux agents et aux aviateurs abattus. Ils servaient aussi de guides jusqu’au village côtier breton de Plouha, sous étroite surveillance allemande. Là-bas, les fugitifs étaient cachés jusqu’à ce qu’une canonnière motorisée britannique passe les chercher.

La première évacuation réussie, qui permit à 16 aviateurs et deux agents britanniques de rentrer chez eux, eut lieu par une nuit sans lune du 29 janvier 1944.

À la fin du mois de mars 1944, l’opération Bonaparte avait pu faire quitter le continent à 128 aviateurs (dont 94 Américains). Le plan Shelburne vint en aide à 307 personnes en tout. « Notre décision concernant les deux hommes s’est révélée judicieuse, et ils ont obtenu de magnifiques résultats », écrivit le capitaine Airey Neave du MI9.

Après les débarquements du jour J, Dumais et LaBrosse combattirent aux côtés de résistants français jusqu’à l’arrivée des troupes alliées. Ils survécurent à la guerre, et tous deux reçurent la Croix militaire ainsi que des décorations françaises et américaines.

]]>
Le caporal Frederick Percival Bousfield https://legionmagazine.com/fr/2024/04/le-caporal-frederick-percival-bousfield/ Mon, 22 Apr 2024 16:05:40 +0000 https://legionmagazine.com/fr/?p=6505

Le capitaine Scott McDowell était très jeune, huit ou dix ans à peine, quand il a entendu le nom de Percy Bousfield pour la première fois. Ainsi se nommait l’un de ses arrière-grands-oncles qui avait pris la mer et bourlingué dès 14 ans avant de s’enrôler dans l’armée et d’être tué au front occidental en 1916.

La dépouille du caporal Bousfield, signaleur de 20 ans incorporé dans le 43e Bataillon (Cameron Highlanders of Canada), était introuvable, et sa dernière demeure inconnue. Mais, la légende perdurait dans sa famille.

La grand-mère maternelle de McDowell était une Bousfield, et c’était un parent dont il entendit souvent parler en grandissant, même s’il ignorait que des recher-
ches étaient en cours. Il ne savait pas non plus que le nom du soldat inconnu était inscrit au Mémorial de la Porte de Menin, à Ypres, en Belgique, parmi ceux de plus de 54 000 combattants de l’Empire britannique.

(page 6-7-8-9) Le souvenir de Frederick Bousfield s’est perpétué dans la légende familiale. Il existe foule de photos, cartes postales, lettres et souvenirs de l’ancien matelot. Bousfield naviguait de par le monde lorsque sa famille a immigré d’Angleterre au Canada et s’est établie à Winnipeg en 1912.

En aout 2022, McDowell, officier de carrière dans le renseignement, fut muté à la Direction de l’histoire et du patrimoine des Forces canadiennes à Ottawa en tant qu’officier responsable des journaux de guerre. Il travaillait dans l’un de ces banals édifices en briques quand, trois mois plus tard, ses collègues et lui ont été convoqués à une grande réunion. C’est alors qu’un haut gradé a annoncé qu’une équipe d’enquête avait identifié la tombe du caporal Frederick Percival Bousfield.

« La Terre s’est arrêtée de tourner pendant un instant, nous a confié McDowell. Je me suis dit : “mon Dieu, c’est Percy.” J’étais sidéré. La probabilité était quasiment nulle. C’est complètement fou. Je n’ai pas entendu un traitre mot du reste de la réunion. »

(page 6-7-8-9) Le souvenir de Frederick Bousfield s’est perpétué dans la légende familiale. Il existe foule de photos, cartes postales, lettres et souvenirs de l’ancien matelot. Bousfield naviguait de par le monde lorsque sa famille a immigré d’Angleterre au Canada et s’est établie à Winnipeg en 1912.

Bousfield fut tué lors de la bataille du mont Sorrel le 7 juin 1916 en Belgique. Enlevée aux Canadiens, la côte du saillant d’Ypres fut reprise au fil de deux semaines d’âpres combats. Les unités alliées perdirent 8 430 hommes en 12 jours.

« Il avait quartier libre à ce moment-là, mais il n’est pas resté oisif, et malgré l’épouvantable déluge d’obus, il a fait un superbe travail en portant aide à nos blessés, écrivit Horace John Ford, alors capitaine de sa compagnie, à la mère de Bousfield.

C’est en soulevant l’un de ses camarades sans défense qu’un obus a éclaté à ses pieds, alors vous comprendrez que ce brave garçon n’a pas souffert du tout, et bien que sa mort soit une profonde douleur pour ses proches, ils peuvent tout de même rendre grâce à Dieu et le remercier de la manière dont cela est arrivé. Il accomplissait une œuvre salutaire pour soulager la souffrance, et il l’accomplissait bien et de façon noble, sans peur ni sans songer à récompense. »

La dépouille de Bousfield, anglais de naissance, fut couchée dans une tombe temporaire aux côtés d’autres, derrière un chalet près de l’église de Zillebeke, non loin du lieu de sa mort. Elle fut marquée d’une simple croix en bois, qui devait être remplacée par une pierre tombale blanc ou gris pâle comme celles dont sont parsemés les terrains de cimetière militaire après le transfert des tombes du champ de bataille.

Des milliers de tombes temporaires semblables furent créées à la hâte sur les champs de bataille de la Grande Guerre ou aux alentours. Étant donné la nature stagnante des combats, ils étaient souvent piétinés à maintes reprises, endommagés par le feu de l’artillerie et détrempés par les pluies. Beaucoup se retrouvaient sous les bottes des soldats, d’abord celles de l’ennemi lorsqu’il avançait, puis sous celles des Alliés reprenant l’avance vers l’est. Les terrains étaient inévitablement détruits, et les lieux d’un grand nombre de tombes, par ailleurs documentées, anéantis.

Ainsi fut le sort que connut la dépouille de Bousfield.

Le 14 septembre 1923, une pierre tombale du cimetière de Bedford House, près d’Ypres, fut portée au registre : « A Corporal of the Great War—Canadian Scottish—Known Unto God » (Un caporal de la Grande Guerre – canadien écossais, connu de Dieu, NDT). La dépouille avait été transférée avec d’autres de Zillebeke en février. Elle ne fut pas identifiée et la date de la mort resta inconnue, bien que l’on confirma que dans les autres tombes étaient des victimes de la bataille du mont Sorrel.

« J’ai le regret de devoir vous informer que bien que le quartier du sud-est d’Ypres où le caporal
F. P. Bonsfield [sic] aurait été enterré ait été fouillé, et que les dépouilles de tous ces soldats enterrées dans des tombes éparpillées à l’écart aient été enterrées à nouveau avec respect dans des cimetières afin que les tombes puissent être entretenues à jamais comme il se doit, la tombe de ce soldat n’a pas été identifiée », est-il écrit dans une lettre de l’ancienne Imperial War Graves Commission, devenue la Commission des sépultures de guerre du Commonwealth.

Une carte postale que le matelot de 14 ans Bousfield écrivit à ses parents en 1910.

Bref, Percy Bousfield était perdu, mais pas oublié. Pour un homme de l’époque de 20 ans, il avait eu une vie incroyablement riche et bien documentée, et presque un siècle plus tard, des photos, des lettres et des histoires de ses aventures et de sa mort pour une noble cause s’échangeaient dans sa famille.

Puis, en octobre 2019, la Direction de l’histoire et du patrimoine reçut un rapport de la commission qui détaillait une possible identification de la tombe 68, rangée C, lot 11 dans la division no 4 à Bedford House.

La commission, qui gère plus de 1,1 million de tombes militaires dans plus de 23 000 lieux et dans 150 pays et territoires, avait reçu trois « rapports très détaillés » de chercheurs indépendants indiquant que la tombe était celle du caporal Frederick Percival Bousfield.

« La Terre s’est arrêtée de tourner pendant un instant. La probabilité était quasiment nulle. C’est complètement fou. »

La Direction lança sa propre enquête avec l’aide du Programme d’identification des pertes militaires des Forces canadiennes, de la Forensic Odontology Response Team et du Musée canadien de l’histoire.

Des journaux de guerre, des états de service, des registres de victimes et des rapports d’exhumation et de transfert furent épluchés. La Direction conclut que la tombe ne pouvait être que celle du caporal Bousfield. Les détails de l’identification partielle ne correspondaient à aucune autre personne.

Renée Davis est historienne civile à la Direction de l’histoire et du patrimoine et chargée de recherches principale au Programme d’identification des pertes militaires. Avec une petite équipe d’historiens et d’étudiants en enseignement coopératif, elle mène des recherches et analyse des dossiers portant sur des tombes, ce qui diffère considérablement de l’identification de dépouilles retrouvées.

« Habituellement, on est face à une pierre tombale sous laquelle repose un inconnu, mais pour une raison quelconque, un identifiant d’unité, une date de décès, ou quelque chose de ce genre qui suscite l’intérêt [d’un chercheur indépendant], nous a-t-elle expliqué.

Alors cette personne entame des recherches et rédige un rapport pour la Commission des sépultures de guerre du Commonwealth. »

La commission effectue ensuite une analyse préliminaire du bien-fondé de chaque dossier, puis remet au pays concerné un rapport avec ses conclusions et celles des chercheurs indépendants, ainsi que ses recommandations.

« Bref, Percy Bousfield était perdu, mais pas oublié. Presque un siècle plus tard, des photos, des lettres et des histoires de ses aventures et de sa mort pour une noble cause s’échangeaient dans sa famille. »

C’est à cette étape que l’équipe de Davis intervient. Elle enquête et rédige des rapports accompagnés de recommandations au Comité d’examen du Programme d’identification des pertes militaires sur l’identification catégorique de pierres tombales. Elle n’effectue pas d’exhumation.

Davis explique que son équipe peut identifier de façon sure deux pierres tombales sur dix dans les dossiers qu’on lui confie. Onze des 46 identifications qu’elle a réalisées à ce jour ont été accomplies à partir de stèles, les autres, à partir de dépouilles. La grande majorité sont de la Première Guerre mondiale, où la proportion de disparus au combat fut bien plus grande que lors de la Deuxième Guerre mondiale.

À l’heure où nous rédigeons cet article, le Programme d’identification des pertes militaires se concentre sur 40 enquêtes concernant des dépouilles et sur 38 concernant des tombes.

« On se sent très proche de ces personnes. C’est du concret, note Davis. Des fois, les dossiers comme celui-ci peuvent être bouclés, et c’est merveilleux.

« Mais, assez souvent, il n’y a pas suffisamment de preuves pour affirmer avec certitude de qui il s’agit, ce qui est parfois un peu déchirant. »

Aucun autre profil ne cor-respondait aux rares détails sur Bousfield.

« La famille est chanceuse que Percy était caporal, car sa tombe l’identifiait en tant que tel et en tant que Canadien, et les écrits indiquent qu’il était membre du régiment Highland, souligne Marjorie Bousfield, historienne de la famille et cousine au deuxième degré Marjorie Bousfield. Alors cela limitait vraiment les possibilités.

« Si seul “soldat inconnu” avait été inscrit, il n’y aurait eu aucun espoir, tant ils sont. Dans le cimetière de Percy à Bedford House, il y a [5 139] tombes [du Commonwealth], dont [3 011] ne sont pas identifiées.

« C’est vertigineux. C’est vraiment vertigineux. »

Marjorie Bousfield avait retracé les années de marin de son grand-oncle en parlant avec ses frères et sœurs. Elle avait retrouvé les noms de bateau où il avait travaillé et les nombreux endroits qu’il avait visités. Elle avait aussi découvert des croquis de sa main (il était dessinateur) et des lettres et cartes postales qu’il avait écrites.

La famille, dit-elle, « ignorait complètement qu’il était là-bas », au cimetière de Bedford House, avant que McDowell ne s’assoie à la réunion de la Direction de l’histoire et du patrimoine.

« Cela m’attriste qu’il n’ait pas pu vivre toute sa vie, explique-t-elle. Et c’est encore plus triste quand on multiplie ça par le grand nombre de jeunes hommes qui ont fait la Première Guerre mondiale; un nombre astronomique. Et on pense aux répercussions sur ses proches au pays, car c’était un frère que l’on chérissait vraiment.

« Mais moi, je me sens heureuse. Ce n’est pas comme quand les familles reçoivent des avis de l’armée, ce qui est toujours triste. Nous savions déjà qu’il était mort, donc il n’y a pas cet impact immédiat de tristesse et de tragédie. Nous pouvons donc nous réjouir de savoir où il est. »

Contrairement aux noms de disparu inscrits sur le Mémorial national du Canada à Vimy, en France, qui restent même lorsqu’un disparu est identifié, le nom de Bousfield sera enlevé de la Porte de Menin.

Le soldat Harry Atherton

Harry Atherton n’avait que 19 ans quand il quitta les usines, fonderies et houillères de Tyldesley, sa ville industrielle du nord de l’Angleterre, et qu’il arriva au Canada pour commencer une nouvelle vie.

Il n’aurait pas pu trouver plus loin ou plus différent de chez lui quand il s’est installé à McBride, en Colombie-Britannique, un village des Rocheuses dont la population, même en 2021, n’était que de 588 âmes.

Mais, pour un charpentier comme Atherton, un endroit comme McBride était une promesse de prospérité en 1913.

Loin de la route romaine qui traversait sa ville natale où l’urbanisation et l’industrialisation avaient pris racine au XIXe siècle, McBride était un nouveau village situé au mille 90 de la Grand Trunk Pacific Railway. Une gare était en construction sur ce qui allait devenir la rue Main. Les lieux se développaient grâce à l’agriculture, l’exploitation forestière et la voie ferrée.

Cependant, Atherton ne verrait pas beaucoup plus d’aménagement que le petit édifice avec la plateforme et la pancarte « McBride ». Un an après son arrivée, une guerre mondiale éclatait en Europe, guerre d’où il ne reviendrait pas.

En mars 1916, Atherton, qui était alors un artisan de 23 ans, prit le train vers Edmonton, à l’est, où il s’enrôla dans le Corps expéditionnaire canadien.

En juillet, il était en France, au combat sur le front occidental en tant que membre du 10e Bataillon d’infanterie canadienne.

En aout, Atherton prit le chemin d’une des batailles les plus sanglantes de la guerre, celle de la Somme.

Il reçut une balle à la cuisse gauche le 26 septembre 1916, lors de l’assaut des fortifications allemandes de Thiepval. Ce fut l’une des 241 victimes du 10e Bataillon. Comme c’était souvent le cas avec la boue et la saleté du temps de la guerre en France, la plaie s’infecta. Atherton resta hospitalisé 72 jours et on lui permit de retourner au front en mars 1917.

Il semble qu’il ne participa pas aux combats à la crête de Vimy, mais il avait rejoint le 10e à la mi-mai et il prit part à ceux de la côte 70 au mois d’aout. C’est là, en périphérie de la ville minière de Lens, que les quatre divisions du Corps canadien commandé par le lieutenant-général Arthur Currie se mesurèrent à cinq divisions de la 6e armée allemande. Il fallut 10 jours pour arracher la côte au sol crayeux des mains des Allemands.

Les canons canadiens et britanniques lancèrent presque 800 000 obus sur plusieurs jours avant de passer à l’attaque. Les fantassins avançaient sous le couvert d’un rideau de fumée et d’un barrage rampant, et les balles de mitrailleuse tirées des deux côtés se comptaient par millions.

La bataille finit au combat rapproché, au corps à corps désespéré. La Croix de Victoria fut décernée à six Canadiens pour leurs actes sur la côte 70, quatre d’entre elles pour des combats rapprochés.

Atherton fut blessé le premier jour. La nouvelle de sa mort se répandit peu après.

Le 11 juillet 2017, un siècle après sa mort, des sapeurs de combat nettoyant de vieilles munitions trouvèrent des restes humains près de la rue Léon Droux de Vendin-le-Vieil, au nord de Lens. Il s’agissait de ceux d’Atherton.

On ne saura probablement jamais ce qui est arrivé à ce soldat de 24 ans, ni comment il disparut.

« Pour être franche, je ne fais pas de recherches là-dessus », a avoué Sarah Lockyer, l’anthropologue judiciaire et coordonnatrice d’identification des pertes militaires du Canada qui a analysé la dépouille d’Atherton et rédigé le rapport d’enquête.

« La dépouille est généralement près de l’endroit où elle a été découverte », explique-t-elle. Elle dispose de sept à 14 jours pour ses analyses, alors elle se concentre sur l’identification, et non sur la cause de la mort.

« Il s’agit donc de choses comme le profil biologique : évaluer l’âge, évaluer la taille, s’il y a quelque chose de notable concernant les dents ou s’il y a une fracture mentionnée dans les dossiers, des choses comme ça.

« Au final, ils ont été tués au combat, alors ils sont tous morts à cause de la guerre. »

Plus de 9 000 Canadiens furent tués, blessés ou déclarés disparus au combat sur la côte 70. Il y a eu plus de 1 300 portés disparus là-bas, l’un des plus grands nombres de toutes les batailles de la guerre. Lockyer note que 40 des 41 dépouilles que son bureau analysait au moment de l’entretien dataient de la Première Guerre mondiale, et la plupart de la côte 70. Les autres dataient de la Seconde Guerre mondiale.

« Il y a beaucoup de construction dans cette région et on retrouve des restes de dépouilles un peu partout », explique Lockyer.

Le 10e Bataillon auquel appartenait Atherton perdit 429 hommes sur la côte 70, dont 71 n’ont pas de tombe connue. Parmi les morts se trouvait l’un des six Canadiens à qui fut décernée la VC : le soldat Harry Brown qui périt lors d’une contrattaque le lendemain de la mort d’Atherton.

Les sapeurs qui ont découvert la dépouille d’Atherton ont aussi exhumé plusieurs artéfacts, dont un disque d’identité et des insignes du 10e Bataillon, notamment un insigne de casquette portant le blason distinctif à castor et couronne du bataillon.

L’équipe d’intervention en odontologie médico-légale des Forces canadiennes, le Musée canadien de l’histoire et le Comité d’examen du Programme d’identification des pertes militaires se sont mis au travail à l’aide d’analyses historiques, généalogiques, anthropologiques, archéologiques et d’ADN.

Le disque d’identité, appelé aussi plaque d’identité, illisible, fut envoyé à l’Institut canadien de conservation. L’inscription « 10 BATT » était clairement visible en bas après nettoyage. On voyait aussi une partie de numéro matricule « 4 – – 658 » et « ON » près du bord supérieur droit du disque. Le numéro matricule du soldat dont il est question était le 467658.

Lockyer souligne la difficulté à retrouver les proches d’Atherton. Il n’avait qu’une sœur, et notre anthropologue ne savait pas si elle avait des enfants. Le donneur d’ADN et le proche parent étaient en fait deux personnes différentes, dit-elle.

« Ils étaient tous deux quatre fois arrière-petits-cousins, ou quelque chose comme ça. Ils étaient vraiment éloignés d’Atherton. Ça arrive avec son arbre généalogique. »

Malgré les difficultés, les enquêteurs ont confirmé en octobre 2021 que les restes étaient réellement ceux d’Atherton. Sa dépouille fut enterrée avec tous les honneurs militaires, en France, au mois de juin dernier, avec ceux de deux autres personnes, dans le cimetière britannique de Loos, à Loos-en-Gohelle.

Comme c’est l’usage dans le cas de soldats canadiens retrouvés en France, le nom d’Atherton restera avec 11 285 autres sur le Mémorial de Vimy.

L’insigne de casquette d’Atherton (ci-dessus) portant le blason distinctif à castor et couronne du 10e Bataillon, avec des insignes de col C10 et un titre d’épaule du Canada en laiton trouvés avec ses restes. Le disque d’identité partiellement détruit (ci-dessus, à droite) a permis de confirmer le bataillon et le numéro matricule.

 

]]>
« Quelle journée pour la France! » https://legionmagazine.com/fr/2024/04/quelle-journee-pour-la-france/ Mon, 22 Apr 2024 15:44:59 +0000 https://legionmagazine.com/fr/?p=6496
Henry Alexander Ogden/Wikimedia
Laataille de Carillon le 8 juillet 1758 fut l’un des plus sanglants affrontements sur le sol nord-américain pendant la guerre de Sept Ans (1756-1763), et elle se solda par une victoire décisive des Français et des Canadiens sur la force anglo-américaine. Les combats eurent lieu à 200 kilomètres au sud de Montréal, au fort Carillon qui
protégeait la Nouvelle-France de la colonie britannique de New York. Ce bastion avait été bâti en 1755 au bord de la rivière La Chute qui relie les lacs Champlain et George au sud.

Le 5 juillet, James Abercrombie, major-général britannique de 52 ans, envoya plus de 15 000 soldats (dont 9 000 levés dans les colonies américaines), traverser le lac George. Ils embarquèrent sur un millier de péniches et autres petits bateaux, accompagnés de 30 pièces d’artillerie et mortiers. La flotte recouvrit presque entièrement le lac; c’était alors la force militaire la plus puissante jamais assemblée en Amérique du Nord. Le lende-main matin, une fois la traversée accomplie, la force marcha sur plusieurs kilomètres jusqu’aux abords du fort.

À ce moment-là, l’armée du général français Louis-Joseph de Montcalm s’élevait à environ 3 500 hommes, dont 275 miliciens canadiens. Montcalm, craignant un siège et une attaque imminente, décida de livrer combat à un petit kilomètre du fort, où les hauteurs lui seraient avantageuses, mais le risque gros.

Library of Congress/Wikimedia

Pour se préparer, les hommes de Montcalm construisirent un abattis de 500 mètres de long à l’aide d’arbres abattus, de souches, de bâtons pointus et de branches et arbustes entremêlés. Derrière cela, ils bâtirent un imposant épaulement en rondins et en terre qui servirait d’abri et de protection. Et pendant ce temps, Abercrombie resta les bras croisés.

Finalement, le 8 juillet, en milieu de journée, alors que son artillerie se trouvait encore au point de débarquement, Abercrombie ordonna un simple assaut frontal de quelques milliers de soldats réguliers et tint
les Américains en réserve. Il espérait que le nombre impressionnant de ses hommes suffirait à écraser les Français, mais l’attaque manquait de coordination et les fantassins britanniques n’avançaient pas en force unifiée. Les « tuniques rouges » britanniques se retrouvèrent vite prises au piège dans un dédale d’abattis. Il suffit alors aux Français de ravager les rangs sous des décharges de mousquets pour causer de lourdes pertes.

À la bataille de Carillon, en 1758 (en regard, en haut), le général français Louis-Joseph de Montcalm (en regard, en bas) commandait les troupes qui vaincurent les forces britanniques dont le nombre était supérieur et qui étaient commandées par le major général James Aberrcombie (ci-dessous) au fort avoisinant la
Wikimedia

Selon David Perry, milicien du Massachusetts, « un homme ne pouvait rester debout sans être touché ». En s’abritant, il put « entendre les hommes hurler et les voir périr tout autour » de lui.

Abercrombie resta dans son quar-tier général à presque deux kilomè-tres de là et, pendant la journée, il ordonna le lancement de cinq autres attaques semblables. Aucune ne porta fruit. Ses meilleurs soldats ayant été abattus, il donna l’ordre humiliant de se retirer vers l’extrémité sud du lac George, avec son armée « dont la vie tenait à des rames », dans les mots de l’historien Fred Anderson.

Allan Ramsay/Wikimedia

« Quelle journée pour la France! […] quelles troupes que les nôtres » écrivit par la suite à un ami Montcalm, qui avait commandé derrière ses fortifications. Presque 2 000 soldats britanniques furent tués ou blessés, dont 350 des colonies américaines. Les pertes françaises
se montèrent à 372 hommes.

Ambercrombie fut rappelé en Angleterre et ne se vit plus jamais confier de rôle de commandement sur le terrain. En 1759, les Français abandonnèrent le fort Carillon et prirent la route du nord.

]]>
De la lumiere sur le chemin https://legionmagazine.com/fr/2023/09/de-la-lumiere-sur-le-chemin/ Mon, 25 Sep 2023 19:56:57 +0000 https://legionmagazine.com/fr/?p=6465
Deux signaleurs utilisent un projecteur de lumière à bord du NCSM Assiniboine en 1940 (en regard).
Gerald Moses/MDN/BAC/PA-116048

En juillet 1942, une flottille de 13 U-boot passa des jours à traquer le convoi ON-115 en Atlantique Nord. Le piège devait se refermer les 2 et 3 aout, mais le mauvais temps compromit l’attaque des sous-marins. La situation n’en était pas moins tendue.

Les sous-marins allemands coordonnaient leurs manœuvres par radio. De leur côté, les 12 bâtiments escortant le convoi de 41 navires marchands n’avaient pas de système « Huff-Duff » à bord, l’équipe-ment de radiogoniométrie haute fréquence abrégé en HF/DF, qui leur aurait servi à les localiser avec précision. Les Allemands se guidaient vers leur proie grâce à une technologie semblable ou en interceptant les signaux radio des navires des Alliés.

Le groupe d’escorteurs du convoi était canadien et se composait des contretorpilleurs Saguenay et Skeena ainsi que des corvettes Agassiz, Louisburg, Wetaskiwin et Sackville de la Marine royale canadienne. Pour maintenir la formation du convoi, les escorteurs et les navires mar-chands s’envoyaient des signaux lumineux à l’aide de lampes. La majeure partie des messages sur les mouvements du convoi se transmettaient ainsi pour éviter que les U-boot les interceptent.

Le convoi ne perdit finalement que trois navires marchands. Un désastre encore plus important fut évité grâce au mauvais temps et au manque d’expérience de certains des membres d’équipage des U-boot.

Et les sous-marins détectés par des vigies attentives ou un radar furent attaqués. Le Sackville en prit trois pour cible. Deux subirent des dégâts considérables les forçant à se retirer, et l’on pensa même, bien qu’à tort, que l’U-552 avait coulé.

C’est d’ailleurs le Sackville, dernière corvette du genre, qui servit de modèle de corvette dans Greyhound, film de Tom Hanks sur un groupe d’escorte de la Seconde Guerre mondiale. Au début du film, une corvette communique avec un avion à l’aide d’une lampe clignotante afin que les Allemands ne puissent pas la repérer.

La communication par signaux lumineux plutôt que par radio permit de sauver d’innombrables vies lors de la bataille de l’Atlantique. L’histoire de ce système de signaux est intéressante, et il pourrait bien être en train de renaitre.

La communication par signaux lumineux se fait à l’aide d’une lampe à obturateurs mobiles permettant de produire des clignotements. L’alphabet, les chiffres et la ponctuation sont codés en Morse : les signaux les plus longs sont des tirets, les plus courts sont des points. Ce type de communication marche nuit et jour, et elle est visible de plus loin que les pavillons de sémaphore.

La Marine royale a commencé à utiliser les signaux lumineux dès 1867, et c’est depuis un classique de la communication maritime. Ils ont été très utilisés pendant les deux guerres mondiales, surtout lors de la bataille de l’Atlantique, où ce fut le principal moyen de communication entre navires.

La communication internavire était importante pour transmettre des messages administratifs, mais aussi pour orchestrer le mouvement des convois.

Un « écran » de navires de guerre protecteurs gardait les convois : c’était la défense la plus efficace contre les escadres de sous-marins. Grouper les navires marchands les rendait plus difficiles à localiser pour les sous-marins allemands. Cependant, les contrôler était compliqué, car la MRC manquait de signaux visuels. Anecdote cocasse : un officier supérieur exaspéré qui supervisait un convoi envoya un jour par signaux la question « Que faites-vous? » à une corvette de son groupe. La réponse? « Nous apprenons beaucoup. »

En mer, le lieutenant Stuart Keate (ci-dessus) lit un message envoyé par signaux lumineux à bord du NCSM Uganda en 1945.
MDN/BAC/PA-104384

La MRC utilisa aussi des lampes clignotantes infrarouges à réception non directionnelle pendant la Seconde Guerre mondiale. C’était le mode de communication par signaux clignotants le plus sûr, mais il fallait le matériel de détection infrarouge pour recevoir le message.

LA COMMUNICATION PAR SIGNAUX LUMINEUX PERMIT DE SAUVER D’INNOMBRABLES VIES LORS DE LA BATAILLE DE L’ATLANTIQUE.

Toutes sortes de signaux clignotants servirent pendant la guerre froide, mais son utilisation diminua beaucoup en 2007. Les innovations en radiocommunication et en communication par satellite remplacèrent presque entièrement les signaux clignotants, bien qu’ils s’emploient encore occasionnellement lors d’exercices de communication entre navires.

Aujourd’hui, les navires de la MRC naviguant de conserve par tous les temps ne maintiennent plus de quart de signalisation visuelle extérieure. Même au début des années 1990, les compétences en communication par signaux n’étaient plus celles de jadis.

En ce temps-là, à une heure très matinale, un réserviste de la MRC ayant une expérience des signaux lumineux fut obligé de quitter la chaleur de son lit pour aller sur le pont lire un message lumineux d’un navire américain. Aucun des communicateurs de quart ne pouvait le déchiffrer. L’officier, désireux comme tous ses congénères de démontrer l’efficacité de son quart, était impatient de savoir ce que disaient les alliés. À moitié réveillé, le réserviste marmonna qu’ils souhaitaient le « bonjour » au navire. Puis, il repartit prendre son café. Ce n’est pas sur cela que reposent les opérations navales modernes, dira-t-on.

En effet, pratiquée comme elle l’est depuis plus de 150 ans, la communication par clignotement lumineux a peut-être fait son temps. La faible vitesse à laquelle les messages peuvent être envoyés est son principal inconvénient, car l’opérateur se doit de se caler sur la vitesse de lecture du destinataire. La station réceptrice doit accuser réception de chaque mot au moyen d’un flash lumineux avant que le suivant puisse lui être envoyé.

Bien que la norme de l’OTAN soit de huit mots par minute, on en envoie généralement jamais plus de six. Les communications par satellite modernes ont une bonne bande passante et sont habituellement fiables, mais elles restent quand même vulnérables aux interceptions. Les messages radio, bien qu’ils dépendent toujours de bonnes conditions atmosphériques et d’autres facteurs, sont désormais de très loin supérieurs à ce qu’ils étaient pendant la Seconde Guerre mondiale. Ainsi donc, il semblerait que la technologie ait rattrapé la communication par signaux lumineux.

Pourtant, elle a encore certains avantages. On ne peut l’intercepter que si l’on se trouve dans le champ de vision. Et les signaux lumineux peuvent toujours servir de moyen de communication entre les navires pendant les périodes de silence radio. Alors, pourrait-on émettre et recevoir des signaux lumineux beaucoup plus rapidement grâce à la technologie moderne?

L’artiste Albert Cloutier a illustré un membre d’équipage de l’Aviation royale canadienne communiquant avec un navire d’escorte pendant la Seconde Guerre mondiale en utilisant un équipement plus basique (ci-contre).
Albert Cloutier/MCG/19710261-1839

EN MARS 2020 A ÉTÉ EFFECTUÉ UN DEUXIÈME ESSAI AVEC DES DÉL POUVANT ENVOYER JUSQU’À 1 200 MOTS PAR MINUTE.

Des marins américains testent le convertisseur de lumière clignotante en texte, dernière technologie de signaux LUMINEUX, en juin 2017.
John Williams/US Navy (2)
Des marins américains testent le convertisseur de lumière clignotante en texte, dernière technologie de signaux LUMINEUX, en juin 2017.
John Williams/US Navy (2)

En 2016, la marine américaine a commencé à élaborer un convertisseur de lumière clignotante en texte. L’appareil, qui remplace les opérateurs, lit les messages beaucoup plus vite. Au départ, il s’agissait de lampes à signaux classiques, avec les ampoules au xénon existantes, et reproduisant une vitesse de transmission humaine. Puis, les ampoules ont été remplacées par des lampes à DÉL qui permettent d’envoyer des messages beaucoup plus rapidement. Le chercheur allemand Harald Haas a démontré en premier l’utilisation de DÉL à des fins de communication à très grande vitesse en 2011.

Ce système est mis au point aux États-Unis par l’Office of Naval Research, la Panama City Division du Naval Surface Warfare Development Center, en Floride et Creative MicroSystems. Une petite caméra détecte les messages, ensuite traités en temps réel par un ordinateur portable connecté. L’opérateur envoyant un signal tape simplement le message dans un ordinateur portable : il n’a pas besoin d’être formé au code Morse.

Les premiers essais du nouveau système ont été menés en juin 2017 à Norfolk, en Virginie, entre deux navires utilisant leurs lumières existantes et un ordinateur portable auquel était branché un capteur. Cet agencement a envoyé des messages à environ 120 caractères par minute. Des messages de routine rédigés d’avance pourraient encore accélérer la transmission. En mars 2020 a été effectué un deuxième essai avec des DÉL pouvant envoyer jusqu’à 1 200 mots par minute. On estime que les DÉL peuvent transmettre des signaux à des distances allant jusqu’à 12 milles nautiques, soit 22 kilomètres.

Le seul moyen qu’aurait un ennemi d’intercepter un de ces si-gnaux serait de se placer où il pourrait voir les navires communiquer, ou de se positionner derrière l’un des navires, auquel cas il ne rece-vrait que la moitié de la communication. Bien sûr, ce serait difficile à accomplir sans être vu par les navires qui s’envoient les messages.

Et bien sûr, les ennemis auraient également besoin de technologie pour lire la lumière des DÉL, qui clignotent si rapidement que l’œil humain ne détecte qu’une lumière en continu. Rien n’indique encore quand le nouveau système sera installé sur les navires de la marine américaine, mais il est clair qu’il fonctionne et il pourrait être utile de l’ajouter à l’ensemble des communications des bâtiments de guerre. Les outils de communication militaires modernes, dont les radars, les radios et les satellites, sont vulnérables au brouillage. Les plus grandes armées du monde ont démontré une capacité importante dans ce domaine. Ces mesures peuvent sérieusement dégrader l’efficacité des communications électroniques ou les rendre totalement inutiles. Un convertisseur de lumière clignotante en texte pourrait s’installer facilement, et il servirait à atténuer les problèmes de communication entre navires. Il pourrait également tenir lieu de système de messagerie de secours.

Pour les anciens de l’ère des signaux lumineux, il est encou-rageant de voir la technologie d’origine réutilisée et améliorée pour les opérations actuelles ou à venir. Les signaux lumineux ont encore de beaux jours devant eux. La MRC et les autres marines verront-elles la lumière? 

]]>